Les biens sans maître revenaient initialement à l’État, mais la loi ALUR a modifié cette disposition. À présent, c’est la commune qui est le principal bénéficiaire de ce type de biens. Ainsi, l’article 713 du Code civil dispose que « les biens qui n’ont pas de maître appartiennent à la commune sur le territoire de laquelle ils sont situés », sauf dans le cas où celle-ci refuse d’exercer ses droits. En revanche, en l’absence d’un héritier connu et acceptant, une succession est dite en déshérence lorsqu’elle devient la propriété de l’État. Zoom sur les différences entre ces deux notions.
Les biens sans maître
Définition
L’article L.1123-1 du Code général des propriétés des personnes publiques (CGPPP), dans sa version applicable depuis le 23 février 2022, dispose que les biens sans maître sont :
- « soit des biens qui font partie d’une succession qui a été ouverte depuis plus de 30 ans, si aucun successible ne s’est présenté » et si l’État n’en est pas déjà propriétaire. Par successible, on entend une personne qui a droit à un héritage, mais qui n’a pas encore choisi de l’accepter ou de le refuser. Le délai est ramené à 10 ans dans certaines zones, comme des quartiers qui font l’objet d’une opération d’urbanisme de grande ampleur ;
- « soit des immeubles qui n’ont pas de propriétaire connu et pour lesquels depuis plus de trois ans les taxes foncières n’ont pas été acquittées ou ont été acquittées par un tiers ».
Procédure d’acquisition d’un bien sans maître par une commune
Un bien sans maître est un atout d’acquisition foncière pour les collectivités, mais il nécessite de suivre une procédure spécifique. Ainsi, selon l’article L.1123-1 du CGPPP, le maire doit prendre un arrêté, puis le publier et l’afficher. Il est également tenu, s’il y a lieu, « d’adresser une notification aux derniers domicile et résidence du dernier propriétaire connu ». Si le bien immobilier est habité ou exploité, il est aussi tenu de transmettre un avis à l’habitant ou à l’exploitant.
Dans l’hypothèse où les taxes foncières concernant l’immeuble étaient exonérées ou n’avaient pas été mises en recouvrement selon les dispositions du Code des impôts, le maire doit envoyer une notification au tiers qui aurait acquitté les taxes foncières. Enfin, l’arrêté doit parvenir au représentant de l’État dans le département.
Dans un délai de 6 mois à compter de l’accomplissement de la dernière mesure de publicité, si le propriétaire ne s’est pas fait connaître, l’immeuble sera présumé sans maître. Dans ce cas, la commune, après délibération du conseil municipal, sera en droit d’incorporer le bien immobilier dans son domaine, ce qui devra être constaté par un arrêté du maire.
Si la délibération n’a pas eu lieu dans un délai de 6 mois à compter de la vacance présumée du bien, ce dernier sera attribué à l’État, sauf exception. Ainsi, certains biens sont transférés au Conservatoire de l’espace littoral des rivages lacustres ou au Conservatoire régional d’espaces naturels.
Le bien peut-il être restitué à son véritable propriétaire ?
Rien n’interdit au véritable propriétaire du bien présumé sans maître de le revendiquer pour obtenir sa restitution, dans la mesure où sa requête intervient moins de trente ans après l’ouverture de la succession.
Si le propriétaire se voit restituer sa propriété, il devra s’acquitter du montant des charges restées impayées, mais aussi des dépenses engagées par la commune pour conserver le bien en bon état.
Bon à savoir : cette restitution ne pourra pas être faite si le bien a été vendu ou aménagé dans l’intérêt général de la commune. Dans ce cas, le propriétaire bénéficiera d’une indemnité égale à la valeur de son bien.
Les successions en déshérence
Définition
L’article 539 du Code civil dispose que « Tous les biens vacants et sans maître, et ceux des personnes qui décèdent sans héritiers, ou dont les successions sont abandonnées, appartiennent au domaine public ». On est alors en présence d’une succession en déshérence. Avant cet état de fait, une succession est déclarée vacante si :
- elle n’a pas été réclamée ;
- il n’existe pas d’héritier connu ;
- les héritiers connus y ont tous renoncé ou ne l’ont pas acceptée dans un délai de 6 mois à compter de son ouverture, c’est-à-dire la date du décès.
Procédure de mise en déshérence
Le transfert d’une succession à l’État n’est pas automatique, mais il nécessite un acte volontaire de celui-ci. Ainsi, l’article 811 du Code civil dispose que « Lorsque l’État prétend à la succession d’une personne qui décède sans héritier ou à une succession abandonnée, il doit en demander l’envoi en possession au tribunal ».
C’est le tribunal judiciaire qui est chargé de vérifier si toutes les conditions de la déshérence sont bien réunies. Si tel est le cas, le juge accepte l’envoi en possession qui matérialise le transfert de la succession à l’État.
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