Vous avez décidé de faire une donation. Félicitations ! C’est un acte fort, généreux, souvent chargé d’émotion. Mais voilà : certains donateurs souhaitent s’assurer que le bien donné ne puisse pas être revendu ou cédé à la légère. Pour cela, il existe un outil juridique aussi discret qu’efficace : la clause d’inaliénabilité. Encore faut-il savoir bien la rédiger. Car ce petit bout de phrase peut soulever bien des questions... et des erreurs s’il est mal formulé. Donateurs, donataires : on vous explique, pas à pas, comment rédiger une clause d’inaliénabilité dans une donation de manière claire, légale, utile et bienveillante.
À quoi sert une clause d’inaliénabilité dans une donation ?
Commençons par poser les bases. Une clause d’inaliénabilité interdit au donataire de vendre ou de donner à son tour le bien qu’il a reçu, et ce pendant une certaine durée. Elle protège l’intention du donateur, qu’il s’agisse de maintenir un bien dans le patrimoine familial ou de s’assurer que le don conserve sa valeur symbolique.
Exemple courant : un parent donne un bien immobilier à son enfant, mais souhaite qu’il ne soit pas vendu avant que ce dernier ait atteint une certaine stabilité financière ou familiale. D’où l’idée de bloquer la revente... temporairement.
Mais attention : on ne peut pas interdire éternellement ! Le Code civil veille au grain.
Le cadre légal : ce que dit le Code civil
L’article 900-1 du Code civil autorise la clause d’inaliénabilité… mais la soumet à deux conditions :
- Elle doit être temporaire : une interdiction à vie serait considérée comme excessive.
- Elle doit être justifiée par un intérêt sérieux et légitime : par exemple, la protection d’un jeune majeur ou d’un patrimoine familial.
En pratique, cela signifie que le notaire devra motiver cette clause dans l’acte de donation, en expliquant pourquoi elle est nécessaire.
Comment bien rédiger cette clause ? 3 points importants
Passons maintenant au cœur du sujet : comment rédiger une clause d’inaliénabilité dans une donation sans tomber dans le flou ou l’illégalité ?
1. Soyez clair sur la durée
Pas de formule vague du type "jusqu’à nouvel ordre" ou "pour toujours". Il faut fixer une limite dans le temps, que ce soit une date précise ou un événement (majorité de l’enfant, fin des études…).
Exemple : Le donataire ne pourra aliéner le bien avant le 1er janvier 2035.
2. Justifiez la clause
La rédaction doit inclure la motivation. On ne bloque pas un bien sans raison : la clause doit s’appuyer sur un intérêt sérieux.
Exemple : Cette clause est justifiée par le souhait du donateur de préserver l’intégrité du patrimoine familial jusqu’à ce que le donataire ait atteint une autonomie financière suffisante.
3. Prévoyez une levée possible de la clause
En cas de besoin urgent (difficulté financière, maladie…), le donataire doit pouvoir demander une levée anticipée de la clause, avec l’accord du donateur ou d’un juge. Cette souplesse est indispensable.
Exemple : Le donataire pourra solliciter la levée de cette clause en cas de nécessité, sous réserve de l’accord préalable du donateur ou, à défaut, de l’autorisation du juge des tutelles.
Et si la clause est mal rédigée ?
Une clause mal formulée peut être... totalement inefficace. Dans le meilleur des cas, elle sera considérée comme nulle et non avenue. Dans le pire, elle entraînera des conflits familiaux ou juridiques.
Il est donc vivement recommandé de faire appel à un professionnel pour sécuriser la rédaction.
Quels biens peuvent être concernés ?
Presque tous les biens peuvent faire l’objet d’une telle clause : un appartement, une maison de vacances, des œuvres d’art, des terres agricoles... Il faut simplement que le bien soit identifiable et transférable.
Mais la clause n’aura pas le même impact selon le type de bien. Un bien immobilier, par exemple, nécessitera une mention dans l’acte notarié, inscrite au service de publicité foncière pour être opposable aux tiers.
Une clause protectrice… mais pas une prison
Rassurez-vous : la clause d’inaliénabilité n’est pas une cage dorée. Elle vise à protéger, pas à emprisonner. C’est un peu comme un GPS sur une route sinueuse : elle guide, mais n’empêche pas de changer de cap si besoin.
C’est pourquoi il est essentiel de trouver le bon équilibre entre la volonté du donateur et la liberté future du donataire. La rédaction doit être souple, adaptée, humaine.
Rédiger une clause d’inaliénabilité : avec ou sans notaire ?
La réponse est simple : avec un notaire, toujours. Car il ne s’agit pas seulement de mots, mais d’enjeux juridiques forts. Notre étude notariale accompagne régulièrement des familles pour intégrer une clause d’inaliénabilité claire, équilibrée et parfaitement conforme au droit.
Rédiger une clause d’inaliénabilité dans une donation, ce n’est pas un caprice : c’est un acte réfléchi, encadré, au service d’une volonté de protection. Mais cela demande de la rigueur, du bon sens… et une bonne dose d’humanité.
Donateurs, n’hésitez pas à parler à votre notaire de vos intentions. Donataires, comprenez que cette clause n’est pas une punition mais un coup de pouce à long terme.