La donation, c’est un peu comme une promesse qu’on grave dans le marbre. On donne sans attendre de retour. Mais parfois, la vie nous joue des tours : mésentente familiale, ingratitude, difficultés financières… Et l’on se demande s’il est possible de faire machine arrière. Vous êtes donateur et vous vous interrogez sur la procédure pour révoquer une donation ? Bonne nouvelle : le Code civil vous entend… parfois.
Ce qu’il faut savoir avant d’envisager une révocation de donation
Avant de parler de révocation, rappelons ce qu’est une donation. En termes juridiques, il s’agit d’un acte par lequel vous transférez, de votre vivant, la propriété d’un bien à une autre personne, souvent un proche, sans contrepartie. Une fois signée devant notaire, la donation devient irrévocable… du moins en principe.
Il existe cependant des exceptions prévues par la loi. Et c’est là que votre situation personnelle entre en jeu.
La révocation pour ingratitude : quand la reconnaissance ne suit pas
C’est le motif de révocation le plus fréquemment invoqué. La loi permet de révoquer une donation pour cause d’ingratitude si le donataire (la personne qui a reçu le bien) commet des actes graves à votre encontre.
On parle ici de comportements tels que :
- Des violences ou des injures graves envers le donateur ;
- Le refus d’aide en cas de besoin (abandon de famille par exemple) ;
- Une atteinte à l’honneur ou à la réputation du donateur.
En d’autres termes, si la personne que vous avez généreusement gratifiée se retourne contre vous, la loi vous offre un recours.
Attention : la procédure est encadrée par des délais. Vous avez un an à compter du fait reproché pour intenter une action en justice. Au-delà, il sera trop tard, même si l’ingratitude est avérée.
La révocation pour inexécution des charges : quand les engagements ne sont pas tenus
Certaines donations s’accompagnent de charges : obligation d’entretien, de soins, ou encore le maintien d’un bien dans la famille... Si le donataire ne respecte pas ses engagements, cela peut justifier une demande de révocation.
Prenons un exemple concret : vous faites don d’un appartement à votre fille à condition qu’elle vous héberge jusqu’à la fin de vos jours. Si elle vous met dehors… vous pouvez saisir le juge pour inexécution des charges.
Là encore, ce n’est pas automatique : il vous faudra prouver la défaillance, et passer par une action judiciaire.
La révocation pour survenance d’enfants : une exception rare mais réelle
C’est un cas très particulier, mais bel et bien prévu par la loi. Si vous avez fait une donation sans avoir d’enfants, puis que vous en avez un par la suite, vous pouvez demander la révocation de la donation. Ce cas vise à protéger la descendance légitime qui pourrait se trouver lésée.
Ce droit ne s’applique qu’aux donations entre vifs, non rémunérées, et n’est ouvert qu’au donateur devenu parent après la donation.
La procédure pour révoquer une donation : comment cela se passe-t-il ?
La procédure dépend du motif invoqué. Dans tous les cas, la révocation n’est jamais automatique. Elle nécessite d’aller devant le juge, souvent avec l’aide précieuse de votre notaire.
Voici les grandes étapes :
- Rassembler les preuves : témoignages, écrits, certificats médicaux si besoin…
- Saisir le tribunal judiciaire compétent. Votre notaire ou votre avocat vous aidera à monter le dossier.
- Audience et décision du juge : c’est le juge qui décide s’il y a lieu ou non de révoquer la donation.
Le bien peut alors vous être restitué… mais attention, cela peut parfois s’avérer complexe, surtout si le bien a été vendu ou transmis à un tiers. D’où l’importance d’être bien accompagné dès le départ.
Révoquer une donation : est-ce toujours une bonne idée ?
La révocation d’une donation n’est pas un acte anodin. Au-delà du droit, il y a aussi les liens familiaux, affectifs et patrimoniaux à considérer. Une démarche judiciaire peut parfois tendre, voire rompre, les relations. Il est donc essentiel de peser le pour et le contre, et d’échanger avec votre notaire avant d’engager une procédure.
Par ailleurs, il existe des alternatives plus souples :
- la mise en place d’une charge supplémentaire,
- la renégociation entre les parties,
- la résolution amiable du litige.
Le rôle du notaire dans la procédure
Même si l’action passe par le juge, le notaire reste un interlocuteur central. Il connaît votre situation, votre historique familial et peut vous orienter sur la stratégie la plus adaptée. Il peut également vous aider à documenter votre demande, vérifier la validité de la donation initiale, et faciliter les démarches administratives.
C’est aussi votre meilleur allié pour anticiper les risques dès la rédaction de la donation. Clauses de révocation, conditions suspensives, charges précises… autant d’outils juridiques qu’il peut intégrer pour sécuriser votre générosité.
La générosité n’exclut pas la prudence
Donner, c’est noble. Mais il est tout aussi légitime de vouloir protéger ce que l’on a construit. Si les circonstances changent, la loi offre des leviers pour revenir sur une donation, sous conditions strictes. Que ce soit pour ingratitude, manquement à une charge ou survenance d’enfant, la procédure pour révoquer une donation existe bel et bien.
Prenez toutefois le temps de réfléchir, d’en discuter, et de vous faire accompagner. La marche arrière est possible… mais elle mérite d’être bien balisée.