Lorsqu’un être cher décède en laissant derrière lui des biens dans plusieurs pays, les héritiers doivent relever un défi de taille : régler une succession internationale. Entre différences de législation, démarches administratives à l’étranger et conflits potentiels entre héritiers, ce type de succession ne s’improvise pas. Mais pas de panique : avec les bons réflexes et l’accompagnement adéquat, il est tout à fait possible de traverser cette épreuve sereinement.
Ce qu’est une succession internationale
Une succession est dite « internationale » dès lors qu’elle implique un élément d’extranéité. Cela peut être le lieu de résidence du défunt, la nationalité de l’un des héritiers, ou encore la localisation d’un bien immobilier à l’étranger. Par exemple, si votre père résidait en Espagne, possédait un appartement à Paris et un compte bancaire en Belgique, vous êtes confronté à une succession internationale.
Ce type de situation est de plus en plus courant, notamment du fait de la mobilité croissante des personnes et de la multiplication des patrimoines dans plusieurs États. Et si chaque pays a ses règles, le droit européen a heureusement prévu un cadre pour faciliter la gestion de ces successions complexes.
Quel droit s’applique à la succession internationale ?
C’est la question principale : quelle loi doit-on appliquer ? La réponse dépend du Règlement européen n°650/2012, entré en vigueur en 2015, qui harmonise les règles dans la majorité des pays de l’Union européenne (sauf Danemark, Irlande et Royaume-Uni).
En principe, la loi applicable est celle du pays de la dernière résidence habituelle du défunt. Toutefois, le défunt peut avoir choisi, dans un testament, de voir appliquer la loi de sa nationalité. Cette faculté de choix peut s’avérer utile pour simplifier la succession ou préserver les droits d’un conjoint ou d’enfants.
Par exemple, un Français vivant en Italie peut décider que sa succession sera régie par le droit français. Ce choix doit être clairement exprimé dans un testament, rédigé avec soin.
L’importance de localiser tous les biens
Avant toute chose, il est indispensable d’établir un inventaire complet du patrimoine du défunt, qu’il soit en France ou à l’étranger.
Cela inclut :
- les biens immobiliers (maisons, appartements, terrains) ;
- les comptes bancaires ;
- les investissements ;
- les contrats d’assurance-vie.
Ne sous-estimez pas cette étape : un bien oublié dans un pays étranger peut bloquer la clôture de la succession. Pour gagner en efficacité, vous pouvez consulter des fichiers tels que le Ficoba (pour les comptes bancaires en France) ou interroger les registres étrangers via un professionnel du droit.
Les démarches pratiques pour régler une succession internationale
Une fois les biens identifiés, les démarches commencent. En France, il convient de contacter un notaire, qui sera chargé d’ouvrir le dossier de succession, d’évaluer les biens, de régler les dettes éventuelles et de répartir les actifs entre les héritiers.
Dans le cas d’une succession internationale, il est souvent nécessaire de faire intervenir un ou plusieurs correspondants étrangers, c’est-à-dire des notaires ou avocats implantés dans les pays concernés.
Dans certains cas, il peut être judicieux de désigner un notaire pilote, qui centralisera les échanges et coordonnera les différents interlocuteurs.
L’outil indispensable : le certificat successoral européen (CSE)
Créé par le Règlement européen de 2015, le certificat successoral européen permet de prouver sa qualité d’héritier dans un autre pays membre de l’Union. Il est reconnu dans tous les pays de l’UE concernés par le règlement.
Ce certificat, délivré par le notaire, facilite l’accès aux comptes, la vente de biens ou le transfert de droits dans les pays étrangers. Il évite notamment la nécessité de faire traduire et légaliser des documents nationaux.
Un exemple ? Si votre tante belge décède en France en vous léguant un bien en Espagne, vous pourrez présenter ce document à la banque espagnole ou au registre foncier pour récupérer vos droits sans procédure locale complexe.
La fiscalité : un enjeu non négligeable
C’est souvent la cerise pas très sucrée sur le gâteau. En matière de succession internationale, la fiscalité peut vite devenir un casse-tête, car chaque pays a ses propres règles en matière de droits de succession.
La France, par exemple, taxe les héritiers en fonction de leur lien avec le défunt, mais aussi de la localisation des biens. En cas de double imposition, des conventions fiscales bilatérales peuvent permettre d’éviter de payer deux fois.
Il est donc essentiel de vérifier l’existence d’une convention fiscale entre la France et les pays concernés. À défaut, il faudra calculer soigneusement les droits à payer et faire éventuellement appel à un fiscaliste.
Anticiper pour mieux transmettre
Le meilleur moyen d’éviter les difficultés liées à une succession internationale reste… de l’anticiper ! La rédaction d’un testament international, le recours au pacte successoral ou encore le démembrement de propriété peuvent permettre d’organiser au mieux la transmission de son patrimoine.
En cas de doute, le recours à un professionnel du droit est recommandé.
Et si un conflit survient ?
Les successions internationales sont parfois l’occasion de désaccords entre héritiers : contestation d’un testament, refus de signature, mésentente sur la valeur d’un bien… Dans ce cas, la médiation ou la désignation d’un mandataire peut permettre d’apaiser les tensions. Et si cela ne suffit pas, une action judiciaire sera parfois nécessaire, dans le pays compétent.
Encore une fois, le notaire peut jouer un rôle clé dans la résolution du conflit, en rappelant le droit applicable et en facilitant les échanges.
Photo Pexels