En France, il existe deux types d’adoption : l’adoption plénière, régie par les articles 343 à 359 du Code civil ; et l’adoption simple, régie par les articles 360 à 370-5 du Code civil. La loi n°2022-219 du 21 février 2022, dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 2023, est venue réformer l’adoption. Ses objectifs principaux sont de rendre plus d’enfants adoptables ; de sécuriser les parcours pour garantir le respect des droits des enfants ; et de simplifier les démarches pour les parents adoptants. Cette réforme valorise l’adoption simple qui fait à présent l’objet de dispositions qui lui sont propres. Tout savoir sur les effets de l’adoption simple, ses conditions et la procédure d'adoption.
Quels sont les effets de l’adoption simple ?
Cette réforme a notamment modifié l’article 360 du Code civil qui définit l’adoption simple ainsi : « L’adoption simple confère à l’adopté une filiation qui s’ajoute à sa filiation d’origine (…) L’adopté continue d’appartenir à sa famille d’origine et y conserve tous ses droits. »
L’adoption simple, contrairement à l’adoption plénière, établit une double filiation : elle ne rompt donc pas les liens de filiation de l’adopté avec sa famille d’origine, la filiation établie avec la famille adoptive vient s’y ajouter.
L’article 362 du Code civil précise néanmoins que « l’adoptant est seul investi à l’égard de l’adopté de tous les droits d’autorité parentale. » L’autorité parentale est donc exercée exclusivement par d’adoptant, sauf en cas d’adoption de l’enfant du conjoint, partenaire ou concubin où l’autorité parentale est alors exercée en commun, à condition qu’une déclaration conjointe ait été déposée au greffe du tribunal judiciaire.
L’adoption simple confère à l’adoptant tous les droits et devoirs qu’entraînent l’établissement d’un lien de filiation et notamment une obligation alimentaire : l’adoptant a une obligation alimentaire envers l’adopté et inversement. Les parents d’origine de l’adopté restent tenus par cette obligation si l’adoptant ne peut pas y subvenir, l’adopté n’y est cependant pas tenu envers eux s’il a été admis en qualité de pupille de l’État.
L’adoption simple établit une double filiation, ce qui entraîne donc pour l’adopté une double vocation successorale à la fois dans sa famille d’origine et dans sa famille adoptive. L’adopté et ses descendants ont ainsi la qualité d’héritiers réservataires dans la succession de l’adoptant, mais ne l’ont pas dans la succession des ascendants de l’adoptant, ses grands-parents adoptifs, qui peuvent le déshériter.
Quant au calcul des droits de succession, l’adopté en la forme simple ne bénéficie pas de l’abattement fiscal sur les droits de mutation à titre gratuit et se verra imposé à hauteur de 60% comme une personne non parente, sauf dans certains cas prévue à l’article 786 du Code général des impôts et notamment si :
- L’adopté est l’enfant du conjoint de l’adoptant ;
- L’adopté est mineur au moment du décès de l’adoptant ;
- L’adopté est majeur, mais a reçu de l’adoptant des soins et secours non interrompus de la part de l’adoptant durant au moins 5 ans lorsqu’il était mineur ou bien durant au moins 10 ans durant sa minorité et sa majorité.
Si l’adopté décède sans descendant ou conjoint survivant, sa succession sera répartie par moitié entre sa famille d’origine et sa famille adoptive, à l’exception des biens donnés par l’adoptant ou qu’il aurait recueillis dans sa succession qui retourneront à l’adoptant ou à ses descendants si ces biens existent encore en nature au moment du décès de l’adopté. De même, les biens que l’adopté aurait reçus de ses parents d’origine retourneront à ces derniers ou à leurs descendants s’ils existent encore en nature au moment du décès de l’adopté.
Contrairement à l’adoption plénière, l’adoption simple n’entraîne pas de changement de nom systématique de l’adopté. L’article 363 du Code civil prévoit que l’adoption simple permet l’adjonction du nom de l’adoptant au nom de l’adopté, dans la limite d’un seul nom pour chacun d’eux si l’adopté et l’adoptant ou l’un d’entre eux ont un double nom de famille. L’adoptant a le libre choix du nom adjoint et de l’ordre des deux noms. Cependant, l’adopté doit donner son accord à cette adjonction s’il a plus de 13 ans*. À défaut, le premier nom de l’adoptant se verra ajouté à la suite du premier nom de l’adopté.
Toutefois, à la demande de l’adoptant, le juge peut décider que l’adopté ne portera que le nom de l’adoptant. Il en va de même pour les prénoms de l’adopté qui pourront être modifiés à la demande l’adoptant. Si l’adopté a plus de 13 ans, il devra consentir à ces changements*.
Quelles sont les conditions de l’adoption simple ?
Les conditions pour être adoptant sont les mêmes qu’il s’agisse d’une adoption plénière ou d’une adoption simple :
- L’adoptant peut être une personne seule de plus de 26 ans ou un couple (marié non séparé de corps, lié par un pacte civil de solidarité ou en concubinage) dont l’un des membres a plus de 26 ans ou vivant ensemble depuis au moins 1 an.
- L’adoptant doit avoir au minimum 15 ans de plus que l’adopté, sauf en cas d’adoption de l’enfant du conjoint, partenaire ou concubin où la différence d’âge minimum exigée est de 10 ans, et au maximum 50 ans de plus que l’adopté, sauf dérogation accordée par le juge pour justes motifs.
Les conditions relatives à l’adopté diffèrent cependant sur certains points :
- L’âge de l’adopté importe peu dans le cadre d’une adoption simple contrairement à une adoption plénière. L’article 345-1 du Code civil prévoit en effet que « l’adoption simple est permise, quel que soit l’âge de l’adopté ». L’adopté peut donc être mineur ou majeur (alors que l’adoption plénière n’est permise, sauf exception, qu’en faveur des mineurs de moins de 15 ans). Toutefois, si l'adopté a plus de 13 ans, son consentement est nécessaire et devra être recueilli par un notaire. Si l’adopté n’est pas en mesure d’exprimer son consentement, le tribunal pourra tout de même prononcer l’adoption si elle est conforme à l’intérêt de l’adopté.
- Peuvent être adoptés en la forme simple :
- Les personnes majeures
- Les personnes mineures suivantes :
- Les pupilles de l’État dont le conseil de famille a consenti à l’adoption
- Les enfants dont les parents ou le tuteur ont consenti à l’adoption
- Les enfants judiciairement déclarés délaissés
Un enfant adopté de façon plénière peut être adopté en la forme simple s’il est justifié de motifs graves (sauf dans le cas de l’adoption de l’enfant du conjoint, partenaire ou concubin l’ayant adopté en la forme plénière ou simple, où cette justification n’est pas nécessaire).
L’adoption est prohibée entre ascendants et descendants en ligne directe, et entre frères et sœurs. Le juge peut toutefois déroger à cette interdiction en cas de motifs graves et dans l’intérêt de l’adopté.
La procédure de l’adoption simple
L’obtention d’un agrément
Le ou les prétendants à l’adoption, plénière ou simple, doivent obtenir un agrément délivré par le Président du Conseil départemental (service de l’aide sociale à l’enfance – ASE) lorsque l’adopté est un pupille de l’État, un enfant confié par un OAA (organisme autorisé pour l’adoption) ou un enfant étranger.
Le service d’aide sociale à l’enfance (ASE) du département va diligenter une évaluation sociale et psychologique menée durant 9 mois par des professionnels (assistant social et psychologue) permettant de s’assurer que les conditions d’accueil sur le plan familial, social, éducatif et psychologique sont réunies pour préserver l’intérêt de l’enfant. Cet agrément est valable 5 ans. La loi du 21 février 2022 rappelle que "L'agrément a pour finalité l'intérêt des enfants qui peuvent être adoptés. Il est délivré lorsque la personne candidate à l'adoption est en capacité de répondre à leurs besoins fondamentaux, physiques, intellectuels, sociaux et affectifs” (L 225-2 du CASF).
Le placement de l’enfant
Avant la réforme de 2022, le placement de l’enfant n’était pas requis dans le cadre d’une adoption simple, mais seulement dans le cadre d’une adoption plénière. La réforme a étendu ce placement aux enfants pupilles de l’État et aux enfants judiciairement déclarés délaissés.
La requête en adoption
L’adoptant doit former une requête en adoption auprès du Tribunal de Grande Instance de son lieu de domicile. Le recours à un avocat n’est obligatoire que si l’adopté n’a été recueilli qu’après 15 ans.
Après s’être assuré que les conditions légales sont remplies et que l’adoption est conforme à l’intérêt de l’enfant, le juge se prononcera dans un délai de 6 mois suivants le dépôt de la requête.
L’adoption produit ses effets à compter du dépôt de la requête en adoption.
La transcription sur les registres de l’état civil
Le jugement d’adoption simple sera porté en marge de l’acte de l’acte de naissance de l’adopté et l’adopté figurera sur le livret de famille du ou des adoptant(s).
À noter : contrairement à l’adoption plénière, l’adoption simple peut être révoquée pour motifs graves. Si l’adopté est majeur, la révocation peut être demandée par l’adoptant ou par l’adopté lui-même. S’il est mineur, seul le ministère public peut demander cette révocation. Le jugement révoquant l'adoption devra être motivé et mentionné en marge de l’acte de naissance de l’adopté. Cette révocation fait cesser pour l’avenir les effets de l’adoption à l’exception de la modification des prénoms le cas échéant.
* Consentement à adoption : dès qu’un consentement est requis, il doit être reçu par un notaire.
* Héritier réservataire : héritier auquel une quotité de biens (la réserve) est réservée par la loi dans la succession du défunt. Il s’agit des descendants du défunt et en l’absence de descendants, les ascendants ; en l’absence de descendants et d’ascendants, le conjoint survivant.