Qu’il s’agisse d’un achat immobilier, d’un partage successoral ou d’une opération d’entreprise, les notaires et la sécurisation des transactions bancaires vont de pair. Concrètement, l’office notarial tient des comptes dédiés auprès de la Caisse des dépôts (CDC), contrôle l’identité et l’origine des fonds, interdit ou limite certains moyens de paiement, vérifie les bénéficiaires effectifs et, le cas échéant, alerte TRACFIN. L’objectif est simple : un flux d’argent traçable, conforme au droit, et effectivement reçu par la bonne personne, sans mauvaise surprise au moment de la signature.
Où va l’argent ? Comptes professionnels à la Caisse des dépôts
En France, les comptes professionnels des notaires sont obligatoirement hébergés à la Caisse des dépôts et consignations. C’est un tiers de confiance public qui sécurise les fonds jusqu’à leur remise aux bénéficiaires. Un repère pratique : le BIC du RIB d’un notaire commence par CDCGFRPPXXX. Si ce n’est pas le cas, méfiez-vous et appelez l’étude avant tout virement.
Au-delà de la garde, la CDC encadre les mouvements : seuls des fonds de tiers peuvent transiter sur ces comptes, et les débits ne servent qu’au règlement de l’affaire à l’origine du dépôt. C’est une barrière forte contre les détournements.
À retenir : vous ne virez jamais de fonds à la personne du notaire, mais sur un compte CDC ouvert pour l’office notarial, dédié aux opérations des clients.
Quels moyens de paiement ? Le virement comme principe, l’espèce encadrée
Le virement bancaire est la règle pour les paiements reçus ou émis par un notaire dans les actes authentiques donnant lieu à publicité foncière (ventes, échanges, apports…). La loi impose le virement au-delà d’un seuil fixé par décret ; en pratique, les chambres notariales ont écarté les chèques pour ces opérations depuis plus de dix ans.
Parallèlement, le Code monétaire et financier limite ou interdit l’usage des espèces au-delà de plafonds, pour lutter contre les circuits illicites. C’est l’une des raisons pour lesquelles, dans l’immobilier, le règlement par cash est proscrit.
Qui envoie et qui reçoit ? Vigilance client, bénéficiaire effectif et TRACFIN
Les notaires sont assujettis à la LCB-FT (lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme).
Ils doivent :
- identifier et vérifier leurs clients,
- apprécier le niveau de risque,
- connaître l’origine des fonds,
- surveiller les opérations et déclarer les soupçons à TRACFIN.
Cette vigilance est modulée selon le risque (client, produit, pays, complexité de l’opération).
Lorsque des sociétés sont parties à l’acte, l’office notarial identifie le bénéficiaire effectif (la personne physique qui contrôle réellement la structure) et peut signaler les divergences constatées avec le registre officiel. C’est une brique essentielle pour éviter l’usurpation et le blanchiment.
Enfin, le registre national des gels des avoirs est consultable pour vérifier qu’aucune partie ou bénéficiaire n’est visé par une mesure de gel. L’information est publiée et tenue à jour par la Direction générale du Trésor.
Comment éviter la fraude au RIB ? Les 5 réflexes qui sauvent un virement 💡
- Vérifiez le BIC du RIB : il doit commencer par CDCGFRPPXXX pour un compte de notaire à la CDC.
- Confirmez les coordonnées par un canal direct (téléphone de l’étude, jamais via un mail isolé qui remplace le RIB).
- Méfiance absolue aux RIB modifiés reçus par email ; une fraude courante consiste à pirater une messagerie pour glisser un faux IBAN.
- Testez un micro-virement si le calendrier le permet (ex. 10 €), puis confirmez la bonne réception avec l’étude avant d’envoyer le solde (bonne pratique sectorielle.)
- Ne transmettez jamais un ordre de virement sans contrôle croisé (double validation interne en entreprise, ou coup de fil à l’étude).
Et quand l’argent doit rester « au milieu » ? Le séquestre notarial
En cas de litige ou de condition à lever, le notaire peut être séquestre conventionnel. Il reçoit les fonds à titre de dépôt pour les conserver jusqu’à la réalisation de l’événement convenu ou la fin du différend.
Cette mission est encadrée par le Code civil (art. 1956 s.), avec restitution au bénéficiaire légitime une fois la contestation terminée.
Le numérique renforce la chaîne de confiance 🔐
La signature électronique qualifiée de l’acte authentique électronique (AAE), le versement au MICEN (minutier central électronique) et les outils sécurisés de la profession assurent l’intégrité des documents et la traçabilité des flux.
La transformation numérique du notariat a augmenté la sécurité (et non l’inverse), tout en accélérant les parcours.
Pour aller plus loin sur ces sujets, vous pouvez lire :
- Notariat et numérique : comment la digitalisation sécurise-t-elle et accélère-t-elle vos actes ?
- Comment les notaires protègent-ils vos données personnelles ? RGPD, MICEN, DPO…
- Les notaires et la conservation des actes officiels (sécurité, traçabilité)
Le parcours côté client : simple mais très encadré
Avant le virement
L’office notarial vous demande des pièces d’identité, des justificatifs de domicile, parfois des preuves d’origine des fonds (relevés, attestations bancaires, vente antérieure, donation…). Ce n’est pas du zèle, mais une obligation légale visant à sécuriser la transaction et à vous protéger contre l’usurpation.
Au moment du paiement
L’office vous transmet un RIB CDC et une référence de dossier. L’équipe comptable vérifie ensuite la réception effective, la cohérence des montants et la concordance bénéficiaire/acte avant d’affecter la somme et de procéder à la signature ou au déblocage des fonds. Aucun mouvement n’est fait hors du cadre de l’affaire.
Après l’opération
Si des sommes demeurent en instance (retenues, pénalités, reliquats), l’office les conserve temporairement dans le cadre légal et, le cas échéant, les transfère selon les règles. La Caisse des dépôts tient d’ailleurs un dispositif spécifique pour les sommes non réclamées.
Les notaires et la sécurisation des transactions bancaires, ce n’est pas seulement un RIB à respecter. C’est un écosystème complet : comptes CDC dédiés, virements obligatoires, vigilance LCB-FT, contrôle des bénéficiaires effectifs, recours au séquestre si besoin, signature électronique qualifiée et conservation au MICEN. À la clé : votre argent arrive au bon endroit, au bon moment, et avec une preuve irréfutable.