L’achat d’un bien immobilier en indivision est une solution souvent privilégiée par les couples non mariés pour leur résidence principale ou par des associés qui souhaitent réaliser un projet commun. Chaque indivisaire est propriétaire d’une quote-part du bien, à hauteur de sa contribution financière lors de son achat, sans pour autant qu’il soit divisé matériellement. Cette forme d’acquisition est assez simple à mettre en place, mais elle est soumise à des règles spécifiques qu’il est important de connaître. Tour d’horizon des implications et conséquences juridiques.
Qu’est-ce que l’indivision ?
L’indivision est une situation juridique. Elle est subie dans le cas d’une succession, tandis qu’elle est choisie lors de l’achat d’un bien immobilier par deux ou plusieurs personnes, sans créer de société, comme une SCI par exemple.
L’achat d’un bien immobilier en indivision n’entraîne donc aucune formalité particulière. La répartition des quotes-parts est faite en fonction de l’apport financier de chacun. Chaque acquéreur, appelé indivisaire, est libre de présenter son propre plan de financement.
L’indivision est régie par les articles 815 à 820 du Code civil. Ainsi l’article 815 dispose que « Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention ». Cela signifie que chaque indivisaire peut sortir de l’indivision à tout moment, sauf accord contraire entre les parties.
Les droits et les devoirs des indivisaires
Aux termes de l’article 815-9 du Code civil, tous les indivisaires ont les mêmes droits d’usage et de jouissance du bien, dans la mesure où ceux-ci sont compatibles avec ceux des autres indivisaires et sous réserve de respecter la destination du bien. S’ils ne parviennent pas à se mettre d’accord, l’exercice de ces droits est alors réglé provisoirement par le président du tribunal. Un indivisaire, qui use ou jouit seul du bien indivis, est redevable d’une indemnité aux autres, sauf convention contraire.
Les indivisaires doivent également participer aux charges relatives à l’entretien du bien, chacun étant responsable des dettes de l’indivision dans la proportion de sa quote-part.
La gestion d’un bien immobilier en indivision
Les décisions peuvent être prises par un indivisaire seul, à la majorité des 2/3 des indivisaires ou à l’unanimité des voix, selon la catégorie à laquelle l’acte appartient.
Les actes conservatoires
L’article 815-2 du Code civil dispose que « Tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence ». Pour ce faire, il peut utiliser les fonds de l’indivision et « il est réputé en avoir la libre disposition à l’égard des tiers ». Si ces fonds n’existent pas, il peut obliger les autres indivisaires « à faire avec lui les dépenses nécessaires ».
Les actes nécessitant la majorité des 2/3 des indivisaires
La liste de ces actes est donnée dans l’article 815-3 du Code civil. Le ou les titulaires des 2/3 des droits indivis doivent en informer les autres indivisaires, faute de quoi les décisions prises ne seront pas opposables à ces derniers.
Les actes qui nécessitent l’unanimité des voix
Il s’agit des actes qui ne sont pas en lien avec l’exploitation normale des biens indivis et de tous les actes de disposition, à l’exception de « la vente de meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision » (article 815-3, 3°, du Code civil).
Si un acte de cette catégorie est accompli sans avoir obtenu l’unanimité des voix, il sera inopposable aux autres indivisaires.
Les éventuels problèmes de gestion du bien indivis
Si l’achat d’un bien en indivision offre des avantages, il présente également des risques, le principal étant un manque d’entente entre les indivisaires pour la prise de décisions importantes. Dans ce cas, la situation peut rapidement devenir conflictuelle et gêner la bonne gestion du bien.
C’est ainsi que l’article 1873-1 précise que « ceux qui ont des droits à exercer sur des biens indivis, à titre de propriétaires […] peuvent passer des conventions relatives à l’exercice de ces droits ».
Une convention d’indivision facilite la gestion des parts de chacun et permet de prendre des dispositions de protection pour les indivisaires en cas de décès ou de séparation. Elle doit être établie obligatoirement par un notaire et sa durée peut être indéterminée ou déterminée, sans pouvoir excéder 5 ans avec toutefois la possibilité d’un renouvellement par tacite reconduction, si cette mention est présente dans la convention.
La sortie de l’indivision
Elle est possible pour chacun des indivisaires à n’importe quel moment et pour quelque motif que ce soit.
Elle peut se faire de différentes façons :
- vente du bien et partage amiable (dans ce cas, le partage doit faire l’objet d’un acte notarié, comme spécifié à l’article 835, al. 2, du Code civil) ;
- vente de ses parts à un autre indivisaire ;
- vente à un tiers (sous réserve de l’accord des autres indivisaires si cela est précisé dans la convention d’indivision).
Si aucun accord ne peut être trouvé, l’indivisaire qui souhaite sortir de l’indivision peut alors requérir le partage judiciaire du bien. Dans ce cas, celui-ci est vendu aux enchères.
Toutefois, s’il existe une convention d’indivision à durée indéterminée, les indivisaires sont contraints de rester dans l’indivision jusqu’à son terme, sauf si le juge apprécie souverainement que le partage est demandé pour de justes motifs.
Bon à savoir : dans certaines situations, le juge peut décider du maintien temporaire dans l’indivision, au maximum pendant 2 ans. Cela peut être le cas, à la demande d’un indivisaire, si la conjoncture économique est particulièrement défavorable, ce qui aurait des conséquences financières dommageables en cas de vente du bien indivis (article 820, al. 1, du Code civil).
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